jeudi 28 novembre 2013

28 novembre 2013 : peut-on tolérer toutes les idées ?


Dès lors, un homme tolérant ne serait-il qu'un homme arrangeant, qui tâche de ne pas trop déranger ceux qui justement le dérangent ? Pas si simple : la tolérance a pour limite l'intolérable. Quelle part de contrariété suis-je prêt à accepter sans perdre mon identité ou sans renier mes convictions ? Au nom de la tolérance, les actes intolérants nous sont... intolérables. En effet, en laissant dire et faire les ennemis de la liberté (en tolérant discours et actions xénophobes, par exemple), mon indulgence serait alors coupable de précipiter la ruine des valeurs qu'elle prétend défendre.
(Étienne Gruillot, Faut-il tolérer toutes les idées ?, Milan, 2009)


C'est un fait, je ne suis pas et ne serai jamais un homme arrangeant. J'ai eu quelques réponses peu favorables avec mon papier sur le racisme, et sans doute en aurai-je aussi avec celui sur la 3 D. Mais j'ai l'habitude.
Pour ce qui concerne le racisme, chacun peut avoir ses idées sur la question, je n'en disconviens pas, libre à chacun de se revendiquer porteur d'idées racistes, ou du moins de les accepter : mais que ceux-là ne viennent pas m'accuser de xénophobie, à moins qu'ils ne pensent, avec une certaine perversion, que je fais de la xénophobie anti-française. Pour ma part, je le regrette, mais j'estime que nous n'avons pas à accueillir toutes les idées sans prendre parti ; la puanteur nauséabonde des idées racistes, je ne peux l'accepter, j'en ai trop souffert, des amis aussi, et je ne trouve pour ma part ni raison ni pertinence dans les discours raciste. Je n'ai pas à chercher à comprendre ceux qui profèrent ce genre d'idées, sinon, il me faudrait comprendre aussi Adolf Hitler. Ce qu'ils disent est très grave, on ne peut se taire et leur dire : continuez. Je rappelle que Christiane Taubira n’a pas porté plainte, malgré les insultes et les humiliations qu'elle a dû encaisser. Ce sont des associations qui se mobilisent. Et j'irai manifester samedi prochain à Bordeaux, à l'appel de la Ligue des Droits de l'Homme et de nombreuses associations : et j'espère qu'on sera nombreux.
Quand des journalistes, des politiciens croient bon d'exploiter la souffrance des gens auxquels ils s'adressent en leur désignant des boucs émissaires, ils savent ce qu'ils font, et ce n'est pas à nous de les laisser dire sans réagir devant leurs pires ignominies : ils ne peuvent que s'attendre à ce qu'on leur fasse des reproches, si on a un tant soit peu de sens moral. C'est à nous de séparer le bon grain de l’ivraie pour ne pas risquer un jour, comme cela s’est déjà produit dans l’histoire récente, de voir l’ivraie étouffer le bon grain ? Le nazisme, la fascisme, et les fantoches à leur botte, comme notre régime de Vichy, ont poussé leurs politiques discriminatoires jusqu'à la négation et au final la suppression des « autres » (Juifs d'abord, tziganes, nègres, slaves et autres "races" non-"aryennes", mais aussi homosexuels, malades mentaux, handicapés, et autres catégories), considérés comme des sous-humains.
Un ami immigré, à qui je posais la question : as-tu souffert du racisme depuis que tu es en France (il y est depuis les années 90), m'a fait la réponse suivante : « Pour te parler franchement, je me sens doublement discriminé: 1/ à cause de mon caractère (fier, respectueux de moi-même et conscient de le mériter, et indomptable, quoique pacifiste, aimable et respectueux des gens et des lieux) ; 2/ à cause de mon origine : cela je l'ai vécu de façon horrible dans le domaine professionnel... En ce qui concerne le racisme, le plus criminel à mon sens, est celui qui prive des gens du travail (c'est-à-dire de leur ressource de vie). Pour le reste, c'est moins dangereux, moins malheureux. On peut même y être indifférent sans rien perdre. Quant à la montée du racisme, c'est cyclique et la crise qu'on ne cesse d'amplifier est passée par là. Voilà pour cette question inquiétante. L'Europe a peur, elle sent le déclin de sa domination, elle se barricade et se ferme sur elle-même. Je pense que ce n'est pas la bonne solution. La bonne attitude serait de profiter de tout son potentiel (métissage qu'elle doit assumer), y compris du regard et des valeurs de ceux qui viennent d'ailleurs, ceux qui ont tout quitté parce qu'ils aiment la France, son mode de vie, ses principes, ses valeurs, et qui ont eux aussi des choses à dire, des atouts à faire valoir. »
Personne n'est coupable d'être né quelque part. À moins d'être coupable d'être né tout court... Soyons honnêtes de le reconnaître. Et donc de reconnaître la qualité d'être humain à tout homme et à toute femme. N'est-ce pas un penseur latin qui disait : « Je suis homme, et rien de ce qui est humain ne m'est étranger. » J'en fais volontiers ma devise, aussi bien que celle de la Cimade : « Il n'y a pas d'étranger sur cette terre. »

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