mardi 19 mai 2015

19 mai 2015 : Félix Arnaudin au musée d'Aquitaine


Rester aigu coûte que coûte. Rester en pointe. Ne pas s'arrondir.
(Jean Cocteau, Secrets de beauté, Gallimard, 2013)

Je ne suis pas un grand visiteur de musées. Je le déplore, mais c'est ainsi. Manque d'habitude d'enfance sans doute : ce n'était pas dans les pratiques de mon milieu social. Je n'ai découvert les musées que pendant mon année parisienne de scolarité à l'ENSB (1969-1970), j'avais donc déjà vingt-quatre ans. Bien sûr, j'ai commencé par le Louvre. Il me semble qu'à l'époque, c'était gratuit le dimanche, ou au moins un dimanche par mois. Je voyais donc pour la première en vrai la Joconde et la Vénus de Milo, la Victoire de Samothrace et le Scribe accroupi, la Liberté guidant le peuple et tout un tas d’œuvres d'art qui m'ouvraient l’œil, même si je les connaissais déjà par les livres.
Je me suis rattrapé depuis, et tant dans différentes régions de France que dans mes voyages à l'étranger, j'ai visité pas mal de musées : de beaux-arts, mais aussi musées historiques, ethnologiques, maritimes, d'artisanat ou d'industrie, botaniques et scientifiques, etc. Cependant, j'ai toujours un problème avec mes jambes, et j'éprouve le besoin de m'asseoir de temps en temps : le piétinement imposé par de telles visites reste un peu pénible.
une plantation aux Antilles françaises : au premier plan les cases, 
au loin, la maison des maîtres (maquette) 
Vendredi dernier, j'ai profité de la visite de mon amie C. pour aller pour la première fois au Musée d'Aquitaine, qui occupe le bâtiment de mon ancienne faculté des Lettres et Sciences humaines des années 64 à 67. Souvenirs, souvenirs... Bien entendu, le réaménagement en musée a changé un peu – et même beaucoup – la configuration des lieux. C'est devenu un musée historique, avec des collections permanentes d'archéologie du Bordeaux antique, de pièces du Bordeaux médiéval, toute une galerie du Bordeaux port de commerce et centre névralgique de la pratique de l'esclavage et du commerce triangulaire, etc...

un paysage dans la Haute Lande
Et puis, il y a les expositions temporaires. En ce moment, c'était des expositions photographiques. Bien qu'étant un piètre photographe – je ne pratique que depuis la disparition de Claire, j'aime la photo. Il y avait donc à voir : Félix Arnaudin, le guetteur mélancolique et Hayastan, pensées d'Arménie, Photographies de Gaëlle Hamalian-Testud.

 femmes landaises en deuil
Je passe rapidement sur les très belles et nostalgiques photos arméniennes, où la photographe-voyageuse sait nous faire voir des "images d'un territoire immense et nu, des portraits silencieux et émouvants, des instants de vie intime". Occasion de rencontrer parmi les visiteurs des Arméniens de France, qui n'ont jamais pu oublier le pays perdu et qui nous expliqué quelques photos, notamment les galettes de pain immenses, mises à refroidir sur des fils, comme de grands tissus qui pendent. Photos principalement en couleur, d'une beauté intense. Le lendemain, avec C., nous avons regardé un de mes DVD de Sergueï Paradjanov, Sayat Nova, magnifique portrait d'un poète arménien/géorgien du 18e siècle.
une veillée : on file et on conte
J'ai été davantage fasciné par l'exposition de photos de Félix Arnaudin, observateur, ethnologue, folkloriste et photographe de la Haute Lande. Ses photos en noir et blanc, datant de 1874 à 1921, sont un témoignage inestimable sur la vie quotidienne, les coutumes et costumes, les paysages des Landes au tournant des deux siècles. Je peux témoigner que ça n'avait pas encore tellement changé dans mon enfance, du moins entre 1951 et 1954. Je n'ai pas acquis le catalogue de l'exposition, qui doit peser au moins deux kg ! Mais c'est magnifique et, bien sûr, je suis un peu retombé en enfance. J'avoue avoir grande hâte de lire les Contes qu'il a recueillis, et même ses autres œuvres.
autre paysage de la Haute Lande



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