Anougba
: Parce que les autres ont tué leur dieu, croyant se
libérer aussi. Puis ils se sont sentis vides. Pour combler ce néant,
ils ont inventé un génie implacable, un dieu insatiable : l'argent.
(Amadou
Koné, Le respect des morts, Hatier, 2002)
17
février : Aujourd'hui donc, je sors et me rends à pied
(pas aperçu l'ombre d'un autre "Blanc")
jusqu'à Blockhosso. C'est le matin, il fait déjà très chaud :
j'ai remarqué qu'il y a un peu de vent l'après-midi, mais rien le
matin. Je prends mon ticket de bateau-bus, attends le prochain
bateau, monte. Promenade très agréable qui me fait voir Abidjan vu
du centre de la lagune, Cocody d'abord, puis le Plateau. J'aperçois
la mosquée. Premier arrêt : Plateau. Puis, nous traversons et
je descends à Treichville. Je suis sans plan, mais Lucile m'avait
dit que c'était tout droit, et je trouve facilement.
vue d'Abidjan, du balcon de Lucile et Pierryl
Quartier
très commerçant. Dans le grand marché couvert qui occupe tout un
pâté de maison sur trois niveaux, les marchands sont innombrables.
Apparemment je suis le seul "Blanc".
Aussi suis-je assez sollicité par les uns ou les autres pour acheter
des bijoux ou des marchandises diverses. Mais je cherche les
marchandes de tissu à pagnes, que ma sœur Anne-Marie m'avait
demandé d'acheter pour faire des têtes de lit à l'appartement de
Bordeaux. Bien entendu, je n'y connais rien. Ici ou là, je tâte, je
regarde les couleurs, je demande les prix. En fin de compte, je finis
par faire affaire avec une vendeuse sympathique pour un prix
raisonnable.
les trois tissus choisis
Il
est déjà midi. Je passe un coup de fil à Pierryl dont l'usine
n'est pas loin et qui doit me rejoindre pour déjeuner. Lucile m'a
donné une carte SIM spéciale, car évidemment, mon téléphone ne
marchait pas ici. Je lui donne rendez-vous à l'angle du marché
couvert, celui qui fait face à la mairie. Il me dit qu'il est pris
dans les embouteillages et qu'il faudra que j'attende vingt minutes.
J'en profite pour regarder l'animation du quartier, jeter un œil sur
les magasins de tissu, de l'autre côté de la rue, où j'irai
acheter tout à l'heure du tissu pour me faire faire des vêtements
sur mesure par un tailleur local. Beaucoup de va-et-vient, les
voitures très nombreuses, roulent au pas ou ne bougent pas, dans un
concert de klaxons et dans un embouteillage monstre. Beaucoup de
piétons aussi, mais tous africains.
Pierryl
met une heure pour faire le petit km qui nous sépare de son usine !
Mais je comprends que, vu la chaleur, il n'ait pas eu envie de
marcher à pied. Faut être dingue comme moi ! On fait le tour
du marché couvert et il trouve à se garer non loin du restaurant
sénégalais où il a ses habitudes. Là, nous mangeons du riz au
poulet excellent. Il repart et je fais les magasins de tissu. Pas
évident de trouver du tissu comme je souhaite, c'est-à-dire très
fantaisie et à tonalité africaine (?). Dans les premières
boutiques visitées, on me propose du tissu uni ou à fines rayures
quand je dis que c'est pour des chemises. On me prend pour un
businessman ! Finalement c'est chez un Libanais (mais il tient
la caisse et les employés sont ivoiriens) que je trouve ce qui me
plaît.
Retour
au bateau-bus, comme c'est mal indiqué, je commence par me diriger
vers celui qui va au terminus. L'employé me renvoie vers le bon, et
en vingt minutes environ, je suis de nouveau à Blockhosso, ayant
apprécié la relative fraîcheur du bateau. Je continue à pied mais
par une voie parallèle au Boulevard Latrille : beaucoup moins
de circulation, c'est un quartier plus résidentiel, avec davantage
de verdure. Les taxis en maraude me klaxonnent cependant, sans
succès. Mais
j'ai soif. Je retrouve mon café de Saint-Jean. Au cyber, j'envoie un
premier mail collectif en France. Puis je bois une bière (Flag,
bière locale) bienvenue avant de rentrer.
Comme
c'est mercredi, il y a ciné-club à l'Institut français. En ce
moment : un cycle de comédies françaises récentes. Au
programme, Camille redouble,
de Noémie Lvovsky. Pierryl et Lucile ne l'ont pas vu, moi si, mais
je veux bien y retourner. Nous mangeons d'abord, puis en voiture
jusqu'au Plateau. Très peu de monde dans la grande salle climatisée.
Sur les conseils de Lucile, j'avais heureusement emporté ma polaire,
que j'ai enfilée ! On a bien aimé.
18 février : Aujourd'hui, je quitte Abidjan. Lucile m'a réservé une chambre à l'hôtel Koral Beach de Grand-Bassam. Elle a commandé un taxi, où je retrouve Flore, sa condisciple de Clermont-Ferrand, qui lui a succédé à l'Ambassade de France et qui veut faire visiter à ses parents venus de France l'ancienne capitale du gouvernorat de Côte d'Ivoire entre 1893 et 1900. C'est leur dernier jour, ils reprennent l'avion ce soir. Nous sympathisons, et je descends mon bagage à l'hôtel, où l'on me donne une chambre.
Et
nous nous baladons à pied, d'abord dans la rue centrale. La vieille
ville coloniale, classée au patrimoine de l'Unesco, aurait besoin
d'une bonne rénovation. Presque tout est en ruine. Nous visitons
cependant un ancien bâtiment administratif sous la houlette d'un
guide. Petite exposition. Puis dans une rue transversale, nous
pénétrons dans l'église. Plus loin, j'aperçois la bibliothèque
municipale. Nous y entrons. Il y a trois ou quatre lecteurs,
visiblement lycéens en train de préparer leurs devoirs ou exposés.
Le bâtiment est frais, sans être climatisé. Les livres sont assez
défraîchis. Je ne sais pas s'ils sont aidés par Bibliothèques
sans frontières.
Plus
loin, je photographie la Résidence Boursault, un des rares bâtiments
anciens à avoir été réhabilités. Ayant soif, nous nous
installons dans un maquis en bord de lagune. Nous continuons notre
balade le long de la lagune, puis retraversons par une rue où des
joueurs de dames jouent en plein air, avec beaucoup d'application.
Flore propose qu'on passe par la plage pour trouver un restaurant
qu'elle connaît.
la lagune
Deux
km de plage environ. Nous traversons le village de pêcheurs, avec
leurs belles barques, nous voyons au large un bateau de pêche. Un
homme saute à l'eau et nage jusqu'à la rive. À notre grande
surprise, le pêcheur a nagé avec dans chaque main un grand sac
pesant rempli de poissons qu'il va sans doute rapidement aller vendre
aux restaurants et aux maquis qui proposent du poisson frais. Nous
constatons que les bouts de plastique, qui envahissent aussi le bord
des routes ou les larges trottoirs d'Abidjan, forment également une
couche épaisse sur les plages. Apparemment, il n'y a pas d'usine de
retraitement des déchets, ou pas assez.
Le
restaurant en bord de mer est magnifique. C'est celui d'un hôtel
plus luxueux que le mien. Je choisis le filet de bar, avec attiéké
: absolument succulent. À la sortie du restaurant, nous prenons un
taxi jusqu'à mon hôtel.
Là,
je dois changer de chambre, car je constate que, dans celle qu'on m'a
donnée, les fenêtres ne ferment pas, le bois ayant gonflé à cause
de l'humidité, que la climatisation n'a pas l'air de marcher et que
le poste de télévision a disparu ! On me donne une nouvelle
chambre, proche de la piscine. Je fais la sieste illico.
sculpture en bois dans le jardin de l'hôtel
Je
ressors et me rebalade, découvrant un élevage de chevaux (ils
proposent des balades à cheval sur la plage, très peu pour moi) et
achève en m'arrêtant pour dîner au petit restaurant tout à côté
de l'hôtel. Au menu, brochettes de mérou. En bord de mer, poisson
oblige ! Et, comme la wifi marche à l'hôtel, et que j'ai
emporté mon note-book, j'envoie un nouveau message collectif en
France.
À
suivre...
PS
: je ferai une page spéciale "lectures ivoiriennes", car
vous vous doutez bien que j'ai lu !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire